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SeaWorld coulé par ses orques

Publié le par MagdaRita

SeaWorld coulé par ses orques
Un spectacle d'orques au SeaWorld de San Diego (Californie), en mars 2014. Un spectacle d'orques au SeaWorld de San Diego (Californie), en mars 2014. (Mike Blake. REUTERS)
DÉCRYPTAGE

Le groupe de parcs aquatiques s'est effondré en bourse mercredi 13 août et le cours de ses actions reste très bas. En cause : des mauvais chiffres et une campagne contre la captivité de ces mastodontes des mers.

SeaWorld peine à émerger. Le groupe américain, qui gère onze parcs aquatiques aux Etats-Unis, a vu son action s’effondrer de 31 % mercredi 13 août, à la publication de mauvais comptes trimestriels. La raison ? Elle est sans doute à chercher du côté d’un documentaire, Blackfish, sorti en salles en juin 2013 et qui dénonçait la captivité des orques dans les parcs d’attractions. Elle est aussi à chercher du côté de la campagne de sensibilisation, «Protest SeaWorld», lancée dans la foulée.

Depuis, le cours de l’action reste à un niveau très bas. Après avoir chuté sous la barre des 18 dollars, il est «remonté» vendredi à 20 dollars. Alors que son étiage en 2014 se situait jusque-là plutôt autour des 30 dollars.

SeaWorld avance des raisons liées à une concurrence féroce, à des retards pris dans la construction d’un nouveau parc. Mais il admet «que la fréquentation au (deuxième) trimestre a pâti de la pression générée par la récente attention médiatique autour d’une proposition de loi dans l’Etat de Californie». Un parlementaire californien a en effet déposé un texte en mars 2014 visant à interdire l’exploitation des orques en captivité pour des spectacles. Il avait alors ciblé explicitement le parc SeaWorld de San Diego. Une proposition de loi qui n’est pas sans lien avec le film.

Blackfish, qui fait écho au livre Death at SeaWorldaborde la question de la captivité – et de ses conséquences – sur les orques. Il raconte l’attaque mortelle de Tilikum, une orque venue d’Islande, sur Dawn Brancheau, dresseuse du parc. Le film retrace l’histoire de Tilikum depuis sa capture jusqu’à sa «vengeance» sur l’espèce humaine. La réalisatrice du documentaire a d’abord enquêté sur la mort de la jeune dresseuse, avant de faire le procès de la captivité de l’orque, captivité qui est certainement responsable de cette agressivité. Le film – qui rappelle que les orques en liberté n’ont jamais agressé les hommes – montre bien que la nature reprend le dessus sur l’homme lorsqu’elle est poussée à son extrême limite. 

Le film a reçu de nombreuses critiques positives. The Hollywood Reporter avait loué le film, le présentant comme «un exemple persuasif contre la captivité de l’espèce dans le simple but de divertir les humains». Le 29 juin, Arte a rediffusé le documentaire. Des images violentes jusqu’ici jamais diffusées, accompagnées de témoignages d’anciens dresseurs et de pêcheurs, contribuent à faire de Blackfish un témoignage puissant sur la relation que portent les humains aux orques en captivité. 

Dans le film de Gabriela Cowperthwaite, un expert interviewé nous apprend que «(les orques) ont des capacités que toutes les autres espèces, y compris les hommes, n’ont pas».

Dans le film de Gabriela Cowperthwaite, un expert interviewé affirme que «(les orques) ont des capacités cérébrales que toutes les autres espèces, y compris les hommes, n’ont pas». (capture d’écran du film Blackfish). 

Les faits remontent à 1991, quand Tilikum, avec deux autres orques, tue une apprentie dresseuse après un show. En 1999, c’est au tour d’un visiteur nocturne – probablement ivre – de se noyer avant d’être lacéré par l’orque. Plus rien jusqu’en 2010, où cette fois-ci Tilikum tue sa dresseuse favorite, la réduisant en miettes. Pour la «punir de son crime», le documentaire révèle que les responsables de SeaWorld la droguent et l’enferment durant plusieurs mois dans un enclos long de seulement 6 mètres, et profond de 9 mètres. Dans le noir complet. Cette punition plonge Tilikum dans la folie et la dépression. Aujourd’hui, elle n’a plus de dents sur la mâchoire inférieure à force de ronger continuellement les barres d’acier qui entourent son bassin. 

«C'était la chose la plus horrible

«C’est la pire chose que j’ai jamais faite», témoigne un pêcheur dans le film (capture d’écran du film). 

L’opinion publique américaine semble avoir été touchée par ce documentaire. En décembre 2013, une quinzaine de groupes de rock qui devaient se produire au SeaWorld Orlando (Floride) dans le cadre d’un festival, dont les groupes Hear et The Beach Boys, ont annulé leurs participations. Début août, la compagnie aérienne Southwest Airlines a mis fin à son partenariat avec le groupe.

Manifestation à San Diego de «Protest SeaWorld», le mouvement de contestation né après le film Blackfish.

Manifestation à San Diego de «Protest SeaWorld», le mouvement de contestation né après le film Blackfish (image tirée de la page Facebook «Protest SeaWorld»). 

SeaWorld a tenté de calmer la polémique en créant sur son site une rubrique intitulée «Truth About Blackfish» («La vérité sur Blackfish»), qui dénonce les mensonges «fallacieux»du documentaire. Sans succès pour l’instant. Le groupe a non seulement vu son chiffre d’affaires fondre de 5% au premier semestre, mais il prévoit une chute de 7% sur l’ensemble de son exercice.

Pour tenter de stopper la catastrophe économique, SeaWorld a annoncé vendredi la construction de delphinariums plus «spacieux». Le premier delphinarium de cette nouvelle génération doit être construit à San Diego, en Californie, et contiendra 38 millions de litres d’eau pour une surface de 6.000 mètres carrés et une profondeur de 15 mètres. Il devrait être prêt en 2018. Suivront ensuite les parcs SeaWorld d’Orlando en Floride, et de San Antonio au Texas. En outre, SeaWorld a annoncé le versement de 10 millions de dollars pour «l’étude et la protection des orques dans leur environnement naturel». Des annonces qui ont eu peu d’effet sur le cours de l’action, jusqu’à présent.

L’organisation de défense des animaux PETA a estimé que l’annonce de SeaWorld ne servait qu’à «gagner du temps, alors que les gens comprennent la souffrance des orques en captivité».

Romane FRACHON

Publié dans LES DAUPHINS

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